La courbe des taux comme indicateur financier

La courbe des taux est à nouveau sous les feux de la rampe. Cette courbe, qui reflète la différence entre les taux d'intérêt à 2 ans et à 10 ans, est inversée aux États-Unis et en Europe depuis novembre 2022, ce qui signifie que les taux d'intérêt à court terme sont plus élevés que les taux à long terme. Si cette situation est inhabituelle en soi, elle ne l’est pas compte tenu des conditions économiques et monétaires. Incertitude et nervosité entourent en effet l'inflation, les taux d'intérêt, la croissance, etc., depuis plus de six mois. Ces derniers jours, les taux d'intérêt à long terme ont commencé à grimper en flèche, tandis que les taux à court terme restent stables: la courbe des taux s'inverse rapidement pour retrouver une structure normale.

Courbe des taux normale

En règle générale, la courbe des taux est orientée à la hausse, ce que nous qualifions de ’normal’. Les investisseurs exigent en effet une meilleure rémunération pour le risque à terme, de sorte qu'une obligation à 10 ans rapporte généralement plus qu'une obligation à 2 ans. Une courbe plus pentue indique dès lors que l’on s’attend à une activité économique plus forte, une inflation et des taux d'intérêt plus élevés.

Que signifie une courbe des taux inversée?

Un aplatissement de la courbe voudra dire le contraire: les investisseurs anticipent des hausses de taux d'intérêt à court terme et n’ont plus confiance dans les perspectives de croissance de l'économie. C'est d'ailleurs ce qui ressort clairement du graphique européen depuis un certain temps. Depuis novembre l’an dernier, les investisseurs exigent un rendement supplémentaire pour détenir une obligation à deux ans, en sus du taux à dix ans. Traduction: ils n’ont pas confiance dans l’évolution des conditions économiques. Pareil signal est synonyme de crainte, d’une récession ou autre.

Selon Reuters, la courbe américaine s'est inversée avant chaque récession depuis 1955. La récession est alors intervenue entre 6 et 24 mois plus tard. C’est ce que conclut un rapport publié en 2018 par des chercheurs de la Federal Reserve Bank de San Francisco. Un seul faux signal a été émis au cours de cette période. La situation s’annonce un peu plus nuancée à plus long terme.

Selon le Commonwealth Financial Network, on a recensé 28 cas d'inversion de la courbe des taux depuis 1900, dont 22 ont été suivis d'une récession. Le délai entre l'inversion de la courbe et le début d'une récession était en moyenne de 22 mois, mais variait de 6 à 36 mois pour les six dernières récessions.

Prédictif? Oui, mais...

KBC Asset Management a calculé qu'une courbe des taux inversée a précédé systématiquement toute récession, mais cette courbe n'a qu'un faible pouvoir prédictif. La courbe des taux précède une récession de 10 à 26 mois et les rendements des actions peuvent être particulièrement robustes pendant cette période. Cette situation est le reflet de la solidité pérenne des bénéfices d’exploitation et d'une croissance supérieure à la moyenne dans les secteurs au cycle tardif.

Une courbe normale plus pentue

La raison pour laquelle une normalisation de la courbe des taux est généralement néfaste pour les actions peut être envisagée de deux manières.

  • Une baisse des taux d'intérêt à court terme: cela se produit généralement lorsque la banque centrale réagit à une crise économique en réduisant notablement les taux d'intérêt. Et une crise est très préjudiciable à la rentabilité des entreprises.
  • Une augmentation des taux d'intérêt à long terme, ce à quoi nous sommes confrontés aujourd'hui. Les taux américains à 10 ans sont passés de 4,30% à 4,70% depuis le 20 septembre, entraînant une hausse des coûts financiers et poussant les investisseurs à se tourner vers les obligations. Par conséquent, ce n'est pas tant une courbe inversée qui sème la panique, mais plutôt une normalisation de la courbe des taux qui crée la nervosité financière.

Ces jours-ci, la courbe s'accentue parce que les taux d'intérêt à long terme augmentent plus que les taux à court terme. Les huit dernières fois que cela s'est produit, cela a marqué le début d'une baisse moyenne de 28% de l'indice S&P500. Bien entendu, les actions ne ’doivent’ pas nécessairement baisser dans une telle mesure: parfois c'est plus, parfois c'est moins. Les fluctuations brusques de la courbe des taux n'en constituent pas moins un risque important pour l’humeur sur les marchés financiers.

Observations

La normalisation de la courbe des taux va ces jours-ci de pair avec une volatilité accrue sur les marchés financiers. Mais tout le monde est loin d'être convaincu que l'aplatissement de la courbe reflète la situation de manière fidèle et complète.

Les chercheurs de la Fed ont publié le 25 mars l’an dernier un article suggérant que se servir des marges de taux d’intérêt entre les bons du Trésor à 2 et à 10 ans pour signaler une récession à venir est ’sans doute faux’. Les marges de taux d’intérêt des obligations d'État (bons du Trésor) d’une durée inférieure à deux ans seraient un meilleur signe avant-coureur d'un ralentissement économique à venir. Peut-être, mais la conclusion reste la même.

On peut par ailleurs se poser des questions quant à la valeur de la courbe en tant qu'indicateur de récession. Cela fait par exemple plus d’un an et demi que l’on dit que les économies européenne et américaine flirtent avec la récession. Cela arrivera forcément un jour. Dans ce contexte, une pentification de la courbe des taux est certes un bon indicateur de récession, même si elle n'est pas synonyme de prophétie de malheur, ni de certitude quant à la profondeur, à l'étendue et à la durée de la récession.

Conclusion

La conclusion est claire et simple: beaucoup de choses bougent ces derniers jours dans le monde des obligations, ce à quoi la courbe des taux réagit fortement. Nous passons d'une situation anormale à une situation normale par le biais d'un mouvement à la hausse des taux à long terme.

Il ne faut pas s'inquiéter outre mesure d'une récession dans ce contexte, mais plutôt de l’impact sur le financement et les coûts de financement pour les entreprises. Outre les questions relatives à la croissance du chiffre d'affaires et des bénéfices, la normalisation de la courbe des taux d'intérêt entraînera indirectement une détérioration de l’humeur sur les marchés financiers.

Une courbe des taux qui bouge mérite donc toute l'attention!

Disclaimer

La présente publication est une interprétation générale de la situation économique actuelle et ne peut être considérée comme un conseil en investissement, une recommandation d’investissement dans les instruments financiers décrits ou une proposition de stratégie d’investissement. 

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