Que se passe-t-il en cas de décès rapprochés ou simultanés de conjoints?

À l’approche d’un départ en vacances en voiture, en train ou en avion, certains d’entre-nous peuvent se poser la question de savoir ce qu’il adviendrait pour les enfants si, par malheur, il ou elle devait décéder en même temps que son conjoint, ou dans un laps de temps très court. Cette question, non seulement légitime, est également très importante. Quand parle-t-on de décès simultanés? Hériterez-vous encore l'un de l'autre dans ce cas? Quelles en seraient les éventuelles conséquences fiscales? Nous énumérons ci-dessous quelques principes et conséquences.

L'ordre des décès ne peut être établi

Dans certaines situations particulières, il est impossible de déterminer qui est décédé en premier. On pense principalement aux accidents d’avion ou de la route avec des décès "sur le coup", mais également un incendie, un naufrage ou un autre drame de cet acabit.

En principe, pour pouvoir hériter, il faut survivre au défunt. Toutefois, lorsqu’on ignore qui est décédé en premier et qui a vécu le plus longtemps, les personnes (appelées ’comourants’) sont alors censées être décédées en même temps. Dans ce cas, les défunts n'héritent pas l'un de l'autre. Cela peut avoir d’importantes conséquences, tant sur le règlement des successions que sur les droits de succession à payer, car les successions sont réglées et réparties sans tenir compte de l'existence du comourant. Les successions reviendront alors intégralement aux autres héritiers des défunts.

Exemple: Jacques et Caroline sont mariés et ont deux enfants. Ils n'ont pas de clause particulière dans leur contrat de mariage et n’ont pas rédigé de testament. Ils décèdent dans un accident d'avion et sont censés être décédés simultanément. Les deux successions sont réglées séparément. Jacques n'hérite pas de Caroline, Caroline n'hérite pas de Jacques. Ce sont alors les deux enfants qui héritent en pleine propriété de la succession de leur père et de leur mère.

L'ordre des décès est difficile à établir

Que se passe-t-il si plusieurs personnes susceptibles d'hériter l'une de l'autre meurent à peu près au même moment? Dans ce cas, on essaie d’identifier la personne qui est décédée en premier.

Le Code civil prévoit que si une personne intéressée éprouve des difficultés à établir l’ordre des décès, et ce, par suite de circonstances qui ne peuvent lui être imputées, le juge peut lui accorder un ou plusieurs délais, pour autant qu'il soit raisonnable d'admettre que la preuve pourra être rapportée dans ces délais.

L'ordre des décès est déterminé

Si l'ordre des décès est déterminé, la personne qui a vécu le plus longtemps pourra hériter de la personne décédée avant elle. Le dernier mourant transmet à son tour l’héritage à ses propres héritiers, et ce, même s'il n'a pas été en mesure de l’accepter lui-même. C’est aux héritiers du dernier mourant que revient le choix d’accepter, de renoncer ou d’accepter sous bénéfice d’inventaire la part successorale du premier mourant héritée par le dernier mourant. En cas de désaccord entre les héritiers du dernier mourant, cette part sera acceptée sous bénéfice d’inventaire. 

A moins d’une renonciation, les héritiers du dernier mourant peuvent ensuite réclamer l'héritage du dernier mourant en ce compris la part héritée par celui-ci du premier mourant. Le laps de temps entre les deux décès n’a aucune importance.

Exemple: un couple meurt à la suite d’un accident de voiture. Le mari meurt sur le coup et l’épouse décède dans l'ambulance sur le chemin de l'hôpital. Dans ce cas, on ne parle pas de décès simultanés.

Conséquence? Les héritiers du conjoint qui a vécu le plus longtemps (en l’occurrence, l’épouse) - même si ce n'est que pour une courte période - peuvent prétendre à la succession élargie. Ils peuvent donc hériter des biens du conjoint prémourant.

On règle d'abord la succession du mari, de sorte que l’épouse puisse hériter d’une partie (en pleine propriété ou en usufruit en fonction du régime matrimonial, des éventuelles clauses contenues dans leur contrat de mariage ou dans un testament). Ensuite, les héritiers de l’épouse héritent, y compris les éventuels biens dont elle a hérité de la succession du mari.

Du point de vue fiscal

Est-ce que des décès très rapprochés peuvent avoir des conséquences fiscales désavantageuses? Cela dépend des situations. 

Conjoints avec enfants communs

Dans le cas de décès rapprochés de conjoints avec enfants communs, en l’absence de clause particulière dans leur contrat de mariage ou de testament, le conjoint survivant hérite en principe de l’usufruit du patrimoine du conjoint décédé (dévolution légale). Si le conjoint survivant décède juste après, son usufruit sur le patrimoine du premier conjoint décédé s’éteint, et les enfants recouvrent la pleine propriété sur ce patrimoine et ce, en principe, sans droits de succession. Il n’y aurait dès lors pas d’impact négatif dans la mesure où il n’y a pas de "double imposition". Mais il y a malgré tout une règle particulière: dans le cas d’un usufruit, si l’usufruitier meurt dans les 6 mois du décès du défunt dont il a hérité, il ne sera pas tenu compte de son usufruit pour la liquidation des droits de succession de la succession du premier défunt. Ainsi, d’un point de vue fiscal, pour la succession du premier conjoint décédé, les enfants paieront des droits de succession comme s’ils avaient immédiatement hérité de la pleine propriété des biens du premier conjoint décédé. Signalons que cette règle vaut également pour les rentes ou pensions viagères ou périodiques.   

Par contre, si les conjoints avaient prévu dans leur contrat de mariage des clauses particulières (par exemple une attribution du patrimoine commun en pleine propriété au conjoint survivant ou une donation entre époux dite "institution contractuelle" en pleine propriété), au décès du premier conjoint, les biens de ce conjoint décédé subiront entièrement des droits de succession dans le chef du conjoint survivant, puis à nouveau dans le chef des enfants du fait du décès du dernier conjoint.

Toutefois, une réduction est possible pour atténuer cette "double imposition" dans un tel cas. En effet la loi prévoit que si des biens sont frappés une première fois des droits de succession et font l'objet, dans l'année de la mort du défunt, d'une ou de plusieurs autres transmissions par décès, les droits dus à raison de ces dernières transmissions sont réduits de moitié. Une limite est cependant fixée: la diminution d'impôt à résulter de cette réduction ne peut excéder, pour chacune des transmissions par décès, les droits perçus sur la transmission immédiatement antérieure. 

Conjoints ayant des enfants d’une précédente union

Et qu’en est-il pour des décès simultanés ou rapprochés de conjoints ayant des enfants d’une précédente union?

Il n’est pas possible de passer en revue toutes les situations possibles. Toutefois, cette question a des conséquences potentiellement plus importantes, tant d’un point de vue civil que d’un point de vue fiscal, dans certains cas particuliers, comme par exemple quand l’un des conjoints (mariés en régime de communauté) a des enfants d’une précédente union et l’autre n’a pas d’héritier en ligne directe.

Prenons le cas de Pascal et Sophie, mariés sans contrat de mariage et donc en régime de communauté réduite aux acquêts, dont tous les biens sont communs et qui n’ont pas rédigé de testament. Sophie a deux enfants d’une précédente union et Pascal n’a ni enfant ni parent en vie mais a une sœur.

Dans cette situation, l’ordre des décès est très important:

  • Si Pascal décède avant Sophie, celle-ci devient pleine propriétaire de l’ensemble du patrimoine commun et paie des droits de succession sur la moitié des biens qui étaient communs à eux. Au décès de Sophie, ses enfants héritent de l’ensemble des biens et paient des droits de succession sur celui-ci.  Il y a donc une forme de double taxation corrigée partiellement par la réduction d’impôt décrite plus haut.
  • Si Sophie décède avant Pascal, celui-ci reste propriétaire de la moitié du patrimoine commun et devient usufruitier de l’autre moitié, les enfants de Sophie héritant de la nue-propriété de cette autre moitié. Chacun paie des droits de succession sur la part reçue sauf si Pascal décède dans les 6 mois du décès de Sophie (voir la règle particulière énoncée plus haut). Au décès de Pascal, les enfants de Sophie deviennent pleins propriétaires de leur moitié, l’autre moitié étant héritée par la sœur de Pascal.
  • Si Sophie et Pascal décèdent en même temps, les enfants de Sophie héritent de la moitié des biens des époux et la sœur de Pascal de l’autre moitié. 

 

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