La taxe annuelle sur les comptes-titres 2.0: retour sur les recours en annulation

Suite à l’entrée en vigueur de la nouvelle loi relative à la taxe annuelle sur les comptes-titres (ci-après TACT), nombreux se posent la question de son éventuelle annulation au regard du sort qui a été réservé à la première taxe (ci-après TCT) et des sept recours en annulation devant la Cour constitutionnelle dont elle fait l’objet. Afin de vous permettre d’en connaitre quelques détails, nous vous proposons de revenir sur certains arguments y avancés.

Pour votre bonne information, nous vous rappelons que les recours introduits demandent à la Cour Constitutionnelle de se prononcer sur une éventuelle violation des principes d’égalité et de proportionnalité par la TACT. Pour ce faire, la Cour doit donc examiner les dispositions légales et les moyens mis en œuvre par le législateur eu égard à l’objectif de la loi. Il est donc important que la finalité de la loi puisse être clairement établie.

Les objectifs annoncés et le texte de loi

La TCT se présentait ouvertement comme une taxe sur le patrimoine destinée à faire contribuer ceux ayant le plus de capacités. La TACT, quant à elle, soucieuse ne pas connaître les même critiques que son ainée, se veut être une "taxe d’abonnement", une "redevance" sur l’existence d’un compte-titres, lorsque la valeur moyenne annuelle de celui-ci dépasse 1.000.000,00 euros, et ce indépendamment de toute considération sur la situation matérielle et financière de son détenteur. Son objectif est uniquement budgétaire.

Parmi les arguments soulevés, certains concernent le champ d‘application même de la loi et l’objectif y lié. En effet, si on cerne un produit, certaines dispositions pourraient sembler être contradictoires: pourquoi prévoir un seuil? Pourquoi prévoir une mesure de compensation pour ceux qui dépassent tout juste le seuil? Pourquoi nier les éléments qui composent un compte-titres et qui font que ce produit ne sera pas identique au sein de tous les organismes? Pourquoi certains non-résidents pourraient-ils obtenir une exonération sur base des dispositions liées à l’impôt sur la fortune (prévues par certaines conventions bilatérales)?  Il est certain que la Cour aura à cœur de clarifier ces éléments.

L’existence d’un seuil

Un des arguments avancés consiste à reprocher au législateur de ne pas justifier suffisamment la fixation du seuil fixé à 1.000.000,00 euros. A la lecture des travaux préparatoires, on peut constater que les raisons invoquées sont liées au patrimoine du détenteur et non au produit lui-même et qu’ils insistent sur le fait que la loi veut taxer les contribuables qui auraient à ce point d’actifs qu’ils n’auraient pas d’autres choix que de détenir un compte-titres conséquent. Cela pourrait sans doute être considéré comme une contradiction avec la volonté de taxer le produit et non le patrimoine. 

L’existence d’un seuil est également avancé par le législateur pour expliquer que le coût de perception de la taxe représente un facteur important et que cela créerait un déséquilibre (coût/recette) si elle devait être retenue pour des comptes-titres d’une valeur plus faible. Cette justification faite par le législateur peut en effet surprendre considérant les interventions de tiers dans ladite perception.

Les actifs visés

Contrairement à l’ancienne taxe, la TACT vise l’ensemble des actifs détenus sur un compte-titres, en ce compris les liquidités si elles s’y trouvent. Ce raisonnement confirme la volonté de taxation d’un produit. Ceci dit,  il peut faire apparaitre une discrimination par rapport aux personnes qui détiennent un compte-titres organisé de telle manière que les liquidités y sont détenues sur un compte différent ou sur un sous-compte distinct.

Les mesures anti-abus

En vue d’empêcher l’évitement de la taxe, le législateur a prévu que certaines opérations qui ont pour effet de réduire la valeur du compte-titres ne lui seraient en aucun cas opposables. Il s’agit de la scission d’un compte-titres en plusieurs comptes auprès de la même banque et de  la conversion de titres en titres nominatifs. Cette présomption irréfragable ne s’appliquant qu’à un nombre limité d’opération, une discrimination pourrait apparaître entre des contribuables qui possédaient déjà plusieurs comptes-titres avant l’entrée en vigueur de la loi et ceux qui réaliseraient des opérations qui, sans être identiques, seraient très proches dans leurs effets et conséquences (le transfert d’un compte-titres vers une banque tierce par rapport à la scission d’un compte-titres au sein d’une même banque par exemple).

Les assurances vie branches 23

La loi prévoit différentes exceptions pour les comptes-titres détenus par différentes institutions financières, mais n’inclut pas dans celles-ci les produits d’assurance branche 23, détenus par les compagnies d’assurances sous forme de portefeuilles-titres.

Les compagnies d’assurances seront donc taxées sur ces comptes-titres alors même que les primes qui les ont constitués ont été frappées d’une taxe de 2% lors de leur versement. Cette double taxation pourrait être vue comme discriminatoire, surtout si certaines compagnies d’assurance étrangères parviennent à l’éviter.

Discrimination vis-à-vis des non-résidents

Il est prévu que les non-résidents qui détiennent un compte-titres dépassant le million d’euros en Belgique pourraient être exemptés de la taxe sur base des dispositions des conventions préventives de double imposition relatives à l’impôt sur la fortune. S’il s’agit de la taxation d’un produit, comment justifier cela? L’instauration de cette taxe constituerait en outre, selon les auteurs du recours, une entrave à la libre circulation des capitaux.

La négation des titulaires du compte-titres

La taxe vise le compte-titres sans se soucier du nombre de titulaires. Si ce principe ne devrait pas être discriminatoire sans l’existence du seuil précité, on peut s’interroger sur l’égalité existante entre deux individus liés détenant séparément 1 million d’euros (deux comptes-titres et absence de taxe) et deux individus liés détenant ensemble 1 million d’euros (un compte-titres et présence d’une taxe).

Conclusion

Les motifs de contestation de la TACT 2.0 sont nombreux, et nous n’avons fait ici qu’en survoler rapidement une toute petite partie. La TACT 2.0 aboutira-t-elle à une annulation 2.0? Nous ne manquerons pas de vous tenir informés de l’évolution de ces recours.

Pour votre information, ceux-ci sont inscrits sous le numéro 7623 (les autres numéros sont joints à celui-ci) du rôle de la Cour .

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